François Bustillo, Évêque de Corse

« Une langue est toujours une richesse, jamais un obstacle »

L’appel de Monseigneur François Bustillo, Évêque de Corse, a pesé auprès des jeunes corses. On le sait très investi dans la vie insulaire et soucieux de la jeunesse. À l’approche de la venue du Saint-Père, des inquiétudes auraient pu remettre en cause ce déplacement après les violences intervenues lors des manifestations de colère suite à la décision de la Cour d’appel de Marseille de confirmer l’interdiction de la langue corse au sein de son plus légitime berceau : l’Assemblée de Corse ! Après une telle agression, il faut comprendre cette jeunesse qui se sent dépossédée de sa langue par manque de pratique officielle, qui souvent donc peine à la parler, à la lire, à l’écrire… alors que sa survie repose sur sa volonté de la défendre.
Monseigneur Bustillo ne s’est pas contenté d’un appel, il a rencontré les jeunes étudiants et lycéens pour les entendre, ce que malheureusement peu d’institutions savent faire aujourd’hui. À la sortie de ce rendez-vous, alors que parallèlement les jeunes suspendaient leur mouvement de colère, Monseigneur Bustillo a parlé avec le courage, la volonté, et l’apaisement qu’on lui connaît aux micros de nos confrères de la presse insulaire. Voici ce qu’il a dit de la langue corse et de sa démarche auprès de la jeunesse.

 

 

« Il est important pour l’Évêque d’écouter, quand il y a des cris de douleur, de souffrance, de violence, c’est qu’il y a des questions qui se posent. Donc il est important d’écouter, et d’écouter jusqu’au bout. Moi je ne suis pas venu ici pour faire la morale aux jeunes, mais je leur ai dit pourquoi ? Qu’est-ce qu’il y a ? Quel rêve ? Et moi je leur ai dit, je vous le dis tout simplement, et ils sont d’accord, ils sont partants, c’est qu’il faut faire rêver le monde. Il faut changer la société, il faut s’engager, il faut se donner pour que le monde soit meilleur et pour que nous soyons heureux dans la vie. C’est le but de la vie. Ils ont les capacités, l’intelligence, la volonté, la créativité. Il est important aussi qu’ils sachent que l’Église va les écouter, et les orienter… Une langue est toujours une richesse. Une langue n’est jamais un obstacle. C’est une richesse. Donc quand on a, on connaît et on parle une langue, c’est une bénédiction.

Moi je viens du Pays Basque, vous le savez, quand on parle basque, quand on a un missel en basque, ce n’est pas un attentat contre d’autres. Après il faut accompagner. Moi ce que je leur ai dit, et ce qu’ils savent déjà, l’important c’est de gérer la question de la passion légitime pour que ce soit pacifique, par la voie du dialogue, et par la voie de la construction. C’est eux qui vont construire la Corse de demain. Donc c’est une belle responsabilité, je les encourage à bâtir une Corse heureuse, pacifique, avec une belle identité culturelle qui va de l’avant… [la disparition d’une langue c’est] un drame, toujours. Le but de la vie n’est pas de faire disparaître une langue. Quand on a une langue, quand on possède une langue, on possède une richesse. Cela fait partie du patrimoine culturel, spirituel, donc c’est une bénédiction. »

 

À ringraziavi Eminenza ! •