Maxime Beux mis en examen

Manipulations policières

L’affaire du match Bastia-Reims du 20 février dernier et des incidents qui ont suivi dans les rues de Reims, par des heurts entre la police et de jeunes supporters du club bastiais, n’a pas fini de faire parler d’elle. Maxime Beux avait eu le malheur de perdre un oeil suite à un tir à bout portant d’un policier muni d’un flashball. La police n’a rien trouvé de mieux que de le faire mettre en examen pour une soi-disant participation à des préparatifs d’engins destinés à mener des heurts avec la police lors d’une manifestation de protestation tenue à Bastia dans les jours qui ont suivi.

Pourtant, cette manifestation, venant après plusieurs autres qui avaient dégénéré, devant le commissariat de Bastia et la sous-préfecture de Corti, s’était terminée dans le calme place Saint Nicolas, suivant en cela les appels au calme de nombreux responsables du club et de l’Exécutif territorial. Mais la police, qui craignait les incidents, avait au préalable « déminé » le quartier autour de la Préfecture, but annoncé au départ du cortège. Et les fouilles opérées avaient permis de découvrir un local qui servait de cache à des cocktails Molotov et autres engins artisanaux préparés pour être lancés en fin de manifestation. Six mois plus tard, c’est cette découverte qui est à l’origine de la garde à vue et de l’inculpation de Maxime Beux et d’un de ses amis.

Or Maxime Beux revenait à peine de l’hôpital de Reims quand la manifestation a eu lieu. Il n’avait donc pas de lien avec les préparatifs ni avec les groupes de casseurs des manifestations précédentes. Sans compter que son état de santé ne lui permettait pas de s’engager dans de telles intentions belliqueuses. Aussi, son interpellation après plusieurs mois interroge. Le procès des incidents de Reims est ressorti à l’avantage des supporters au vu des quelques images présentées durant l’audience issues des caméras de surveillance du quartier où s’est déroulée l’altercation durant laquelle Maxime Beux a été blessé par la police. Cependant la condamnation des supporters bastiais a été prononcée sans état d’âme pour calmer une hargne policière relayée au plus haut niveau par le Ministre de l’Intérieur, Bernard Cazeneuve. Mais le procès en appel s’annonce et la défense a exigé, et est en voie d’obtenir, que les vidéos du soir des incidents soient visionnées beaucoup plus largement car elles corroborent la version de policiers déchaînés contre les supporters bastiais. Des témoignages sont venus, de Nantes et d’ailleurs, de brutalités policières équivalentes contre les supporters, alors que des consignes avaient été données au plus haut niveau de réprimer très durement les incidents aux abords des stades du championnat de France. Le procès en appel s’annonce davantage comme le procès des policiers que celui des supporters.

Devant le risque d’une déconfiture judiciaire, la solidarité policière prend les devants et s’ingénie à monter de toutes pièces une mise en cause de Maxime Beux qu’il faut impérativement faire passer pour un dangereux casseur. Et, dans le contexte d’un mouvement revendicatif de policiers qui fait peur au sommet de l’État, on espère sans doute ainsi peser sur la Cour d’appel.

Bastia 1905 a dénoncé les manipulations dont sont victimes Maxime Beux et les supporters présents à Reims. L’État doit reconnaître ses torts et cesser de louvoyer au nom d’une «raison d’État» qui lui commande de ménager des forces de police en pleine effervescence. Car ce qui est en jeu ici est pour nous bien plus important. La jeunesse corse a été révoltée par la blessure infligée à Maxime Beux et le comportement indécent de la hiérarchie policière qui a décidé de couvrir ses hommes à tout prix. Elle a été scandalisée par la sentence prononcée contre Nicolas Battini, Stéphane Tomasini et Ghjiseppu Marìa Verdi. Et elle observe avec beaucoup d’attention la façon dont justice sera rendue dans cette affaire de Reims.

Il ne faudrait pas que le souci de «calmer la police» finisse par réveiller en Corse une violence politique aujourd’hui révolue, mais qui pendant quarante ans avait plongé l’île dans des tensions très graves.

Nous serons très vigilants pour que justice soit rendue aux jeunes Corses mis en cause dans cette affaire.

François Alfonsi.