Vendredi 4 mai, lors du passage d’Eric Zemmour à Aiacciu, un œuf aurait malencontreusement chu sur le crâne d’Eric Z. Ce dernier, n’écoutant que son courage, aurait répliqué en assénant un coup à la victime, alors qu’elle se trouvait de dos. Une vidéo de cet instant circule, le coup porté par Eric Zemmour sur une femme y est nettement identifiable. Une enquête était ouverte pour « violence avec arme par destination ». Sans plus de précision, supposons que l’arme par destination serait l’œuf litigieux. Si l’œuf devait être au centre d’une audience à venir, soulignons que la victime, agressée par Eric Zemmour, se trouvait de dos au moment où ce dernier croyait devoir lui asséner un coup. Une telle riposte pourrait ne pas entrer dans les conditions de la légitime défense.
Eric Zemmour, figure du fantasme raciste français, n’est pas le bienvenu en Corse. Celui qui combat les racines des autres, oubliant que les siennes ne sont pas exemptes de quelques éléments d’extranéité, n’a aucune leçon à donner sur les affaires de la cité en Corse. Lui et ses zélateurs ont fait un choix, celui du mensonge. La recherche de la vérité, du juste, le respect de la communauté scientifique sont absents du discours de ses zélateurs. C’est la déclaration de l’à peu près, la dictature des billevesées, du néant intellectuel, régnant sur la connaissance et la culture.
En cas d’audience, qui, de l’œuf ou la poule, serait responsable d’un prétendu impact sur le crâne d’Eric Zemmour ?
Précisons d’emblée que la question essentielle d’une telle audience porterait sur le caractère cru ou non de l’œuf. Monsieur le Procureur, Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs les juges, un œuf dur n’aurait pas la même force qu’un œuf cru ! Un œuf pèse environ 60 grammes avec coquille, 55 grammes, sans coquille. Il conviendra de déterminer si l’œuf cru est plus impactant que l’œuf dur. Quelle tâche ardue qui entre dans l’office du juge pénal !
L’œuf est un aliment essentiel, pourvu qu’il ne provienne pas d’un élevage en batterie. Qu’il soit dur ou mollet, bénédicte ou mimosa, œuf cocotte ou à la coque, poché ou brouillé, à la poêle ou à la provençale, l’œuf est bon pour la santé. Lorsque les œufs se mêlent dans la poêle, les jaunes valsant avec les blancs, pris dans l’énergie d’un coup de poignet dynamique du chef, ajoutez du lait, du sel, du poivre, et quelques dés de mozzarella, vous obtiendrez des œufs brouillés. Faut-il réconcilier les œufs brouillés ? Tant de questionnements existentiels, Monsieur le Procureur…
Au milieu de tout ce tohu-bohu, pas un mot pour l’œuf, victime du crâne dégarni d’Eric Zemmour, sur lequel deux gouttes de sueur dansent la polka à l’écoute d’un prénom absent du calendrier des saints. L’œuf kamikaze s’est écrasé pour la cause, un ci scurderemu mai, qu’il en soit vivement remercié.
Protégeons nos œufs. Continuons à les transformer pour égayer le petit-déjeuner dominical. Monter des blancs en neige, en voilà une jolie occupation de sybarite. Il émane de l’œuf, tant par sa forme que par les lettres qui le constituent, une certaine sensualité. Le mot « œuf » est composé de « l’e dans l’o », deux voyelles accolées, inséparables, qui forment un son rond. Le « O », Arthur Rimbaud ne s’était-il pas lui-même émerveillé de la sensualité des voyelles ? Le « O », cette lettre ronde et ferme, « – O l’Oméga, rayon violet de Ses Yeux ! ». C’est ainsi qu’on aime l’omelette, ferme et tendre à la fois, quelle volupté le dimanche matin… Les œufs bénédicte, un dimanche matin, éveillent les sens et donnent une vigueur malicieuse à ceux qui les consomment.
Ni Dieu, ni maître mais des omelettes, bordel. •