Il y a 30 ans, la fédération Régions & Peuples Solidaires voyait officiellement le jour. C’est en effet le 17 janvier 1995 que R&PS a été déclarée à la préfecture de Haute-Garonne. Elle rassemble en France douze partis autonomistes ou indépendantistes qui luttent pour la reconnaissance de leurs peuples et de leurs droits légitimes, particulièrement leur droit à une identité propre, une langue, une culture, une nation.
Les premiers pas de R&PS remontent à bien plus de 30 ans… dès les années 1960, les frères Max et Edmond Simeoni s’évertuent à nouer des contacts avec d’autres partis en Europe, particulièrement des partis revendiquant la reconnaissance de leur langue et de leur culture, ainsi que l’autonomie comme statut politique.
En vue de la campagne pour l’élection présidentielle de mai 1988, ces différents partis autonomistes ou nationalistes représentant les régions à forte identité en France, décident sous l’impulsion de Max Simeoni et de François Alfonsi, de soutenir l’écologiste Antoine Waechter pour l’obtention des parrainages nécessaires à sa candidature. Sans cette dynamique, celui-ci n’aurait pas obtenu les 500 signatures qui lui étaient indispensables. Aussi, pour remercier ses nouveaux partenaires, Antoine Waechter offre en 1989 la troisième place sur sa liste en poste d’ouverture à un candidat représentant les régions. C’est ainsi que Max Simeoni fut le premier nationaliste corse élu au Parlement européen ! Fort de sa légitimité notamment au niveau européen avec, quelques années plus tôt en 1981*, la fondation de l’Alliance Libre Européenne devenu l’un des partis politiques européens reconnus au Parlement de Strasbourg, Max Simeoni représenta avec autant de force tout au long de son mandat l’ensemble des langues et cultures bafouées de l’hexagone.
Avec ce succès, 5 ans plus tard, le partenariat avec les verts n’ayant pu se renouveler, la décision est prise par les « régionalistes » de bâtir une liste nommée « Régions & Peuples Solidaires » avec des personnalités fortes, comme les chanteurs Renaud et Jacques Higelin, le peintre Ben Vautier, l’écrivain Gilles Perrault, l’encyclopédiste Roger Caratini, le révérand-père Cardonnel ou encore Charles Napoléon, descendant de l’illustre empereur… La liste s’ouvre aussi aux communautés persécutées kurde et arménienne. Hélas, avec une campagne peu audible au niveau des médias qui se focalisent toujours sur le duel gauche-droite franco-français, et trop tardive du fait des négociations avec les Verts qui ont freiné la décision d’une liste, le résultat électoral n’est pas au rendez-vous. Mais le résultat politique, oui !
Dans la foulée de ces élections en effet, il est décidé de créer un parti, sous la forme d’une fédération regroupant l’ensemble des organisations qui se sont impliquées dans la campagne. Cette fédération prend le nom de la liste : Régions & Peuples Solidaires.
Au premier rendez-vous, ils étaient une poignée de militants déterminés et forts de la conviction que face à l’État français jacobin et le mammouth européen, il fallait absolument se rassembler pour se faire entendre. Parmi les membres fondateurs, Max Simeoni, bien sûr, mais aussi l’occitan Gustave Alirol, qui fut le premier président, le breton Christian Guyonvarch (secrétaire), le corse, François Alfonsi (trésorier), le basque Manex Pagola, l’alsacien Martin Hell, le catalan Jordi Vera, le breton Pierre Fourel, et quelques autres…
Les 11 et 12 novembre 1995 un congrès se tient à Rennes où sont adoptés les statuts de la Fédération dont le premier article énonce :
« Il est créé la Fédération Régions & Peuples Solidaires entre les formations politiques qui représentent des peuples, des communautés culturelles et linguistiques et/ou des réalités régionales historiques et qui sont animées, en opposition à tout esprit de domination ou de xénophobie, par un même idéal de respect des minorités, d’approfondissement de la démocratie, d’autonomie, d’autodétermination et de fédéralisme. Cette fédération exerce ses activités sur l’ensemble du territoire de la République. Elle entend renforcer les liens existants et les étendre à d’autres formations politiques ».
Aujourd’hui, R&PS est une fédération qui regroupe 12 partis : alsacien (Unser Land), basques (EH Bai, EAJ-PNB), breton (UDB), catalans (Oui au Pays Catalan, Unitat Catalana), corses (Femu a Corsica, PNC), mosellan (le Parti des Mosellans), occitan (Partit occitan), savoyard (Sabaudia Mouvement Région Savoie), berbère (Congrès Mondial Amazigh). R&PS est un membre très actif du groupe LIOT à l’Assemblée nationale où elle compte trois députés (Paul Molac, Michel Castellani et Paul André Colombani). Elle compte aussi plusieurs élus, conseillers territoriaux (en Corse), régionaux (en Bretagne), généraux et municipaux (l’ensemble de ses partis).
La fédération est aujourd’hui présidée par François Alfonsi et tiendra son prochain congrès et son Université d’été en Corse au mois d’août 2025.
« Il nous reste encore beaucoup de batailles à mener et nous sommes évidemment loin de notre but final qui est la transformation de la France en un État fédéral qui reconnaîtrait nos peuples. Mais force est de constater que de nombreux progrès ont été accomplis depuis [notre fondation]. Jamais R&PS n’a autant pesé dans le paysage politique. Merci aux fondateurs d’avoir ouvert la voie. Unis dans la diversité, Alsaciens, Basques, Bretons, Catalans, Corses, Mosellans, Occitans, Savoyards et peuples des outre-mer continuons à avancer ensemble ! » réagit sur son site, son directeur l’occitan Pèire Costa.
Longa vita è ventu in puppa à e Regioni è i Pòpuli Sulidarii ! •
F.G.
La charte de R&PS
La fédération Régions et Peuples Solidaires rassemble les partis opposés à la violence, sur une série de fondamentaux :
1/ Combattre le centralisme parisien et celui de l’Europe des états pour réduire les inégalités de développement qu’ils engendrent ou accentuent au détriment de la plupart des régions et peuples.
2/ Permettre à chaque citoyen-ne, si telle est sa volonté, d’étudier, de se former, de travailler et de vivre décemment au pays.
3/ Lutter contre les injustices et agir en faveur du progrès social.
4/ Favoriser la maîtrise de leur économie par nos régions et peuples respectifs, ce qui sera une garantie de leur essor culturel et intellectuel.
5/ Favoriser un développement soutenable, donc durable, et harmonieux de l’ensemble du territoire européen.
6/ Faire valoir la richesse apportée par la diversité, y compris au plan économique, dans un monde en devenir où une identité forte et ouverte est un facteur de dynamisme et où les potentialités culturelles seront des atouts de premier plan.
7/ Encourager la diversité culturelle et promouvoir les identités (langues et cultures) en particulier par une officialisation des langues de nos peuples et de nos communautés.
8/ Préserver, entretenir et valoriser le patrimoine culturel et historique.
9/ Développer la démocratie locale par l’implication permanente des citoyens dans les prises de décision politique et par l’usage du référendum d’initiative populaire.
10/ Promouvoir en France et en Europe le fédéralisme à base régionale ou communautaire selon les principes d’autonomie, de coopération et de solidarité.
11/ Permettre aux peuples divisés par des frontières inter-étatiques, héritages des guerres, de se réunir à la faveur du processus d’unification de l’Europe.
12/ Développer des solidarités avec les peuples en retard de développement, du Sud et d’Europe de l’Est.
13/ Combattre toutes les formes de racisme et de xénophobie et travailler à une meilleure compréhension entre les peuples et les communautés, dans l’échange et dans l’acceptation mutuelle des cultures. •