« Le parti Femu a Corsica tient aujourd’hui à alerter sur la gravité de la situation et sur la nécessité de trouver une issue rapide à la procédure engagée, afin que ces deux joyaux du patrimoine corse puissent être sécurisés, protégés et mis en valeur » a déclaré François Martinetti secrétaire national du parti Femu à Corsica dans un communiqué lors d’une conférence de presse ce samedi 22 octobre.
Le lion de Roccapina, cette superbe sculpture de granit rose naturellement façonnée depuis des millénaires par l’érosion, se trouvant à la croisée des chemins entre Sartene et Portivechju, est l’un des sites les plus emblématiques de la Corse-du-Sud. Dominant sa baie et la plage d’Erbaju, l’animal se dresse, la tête haute, orné de sa couronne, comme le protecteur des lieux.
L’Histoire nous apprend que la construction de sa tour de garde, érigée sur son éperon rocheux, fut planifiée en 1573 dans le cadre de la protection de la côte sud-ouest, zone souvent en danger face aux invasions turques. Elle ne sera finalement bâtie qu’au début du XVIIe siècle.
Mais aujourd’hui la tour génoise de Roccapina est presque à l’état de ruine. Après plusieurs décennies d’abandon, un trou béant s’est formé en son centre.
Le Conservatoire du littoral sanctuarise les trésors du littoral
En Corse, le Conservatoire du littoral protège 21.000 hectares répartis sur 73 sites (sur 63 communes).
Depuis plus de 40 ans, il sanctuarise les trésors du littoral en poursuivant les acquisitions de terrains. Un travail de longue haleine, parfois rendu complexe par de longues procédures.
Au mitan des années 2010, le Conservatoire du littoral se penche sur la tour et le fortin qui couronne la tête du lion de Roccapina, deux édifices très dégradés.
Une procédure d’expropriation a alors été lancée privilégiant une négociation à l’amiable.
« Conformément au code de l’Environnement, nous avons saisi la commune pour avis une première fois le 29 février 2012. Celle-ci a émis un avis favorable par délibération du 18 mars 2016. Le Conseil d’administration du Conservatoire a ensuite décidé d’engager la procédure d’expropriation par délibération du 30 juin 2016 », a indiqué le 12 octobre dernier Michel Muracciole, délégué de rivages Corse, qui suit personnellement le dossier depuis longtemps.
L’expropriation, une procédure exceptionnelle d’atteinte au droit de propriété qui ne forme pas le quotidien des missions du Conservatoire du littoral. Elle donne en outre aux citoyens des possibilités de recours. « Nous avons malgré tout privilégié la négociation à l’amiable avec le représentant de la société concernée, la société Bubika domiciliée en Italie. Après plusieurs échanges, nous avons formulé une dernière offre fin 2019. »
Pendant près de quatre ans en effet, cette société a laissé croire au Conservatoire qu’elle allait vendre, avant de se rétracter.
Durant l’année 2020, le Conservatoire tente en vain de relancer les discussions avec celle-ci. Aussi, devant le silence du propriétaire, il établit le dossier de Déclaration d’utilité publique (DUP) qui a été déposé à la préfecture de Corse-du-Sud le 10 août 2021 (qui en a accusé réception le 13 septembre 2021). « Le commissaire enquêteur a été nommé le 17 septembre 2021 et l’enquête publique s’est déroulée du 26 novembre 2021 au 13 décembre 2021 en application de l’arrêté du 25 octobre 2021 d’ouverture des deux enquêtes publiques conjointes (enquête préalable à la DUP et enquête parcellaire). Le rapport du commissaire enquêteur a été achevé le 15 janvier 2021 et transmis au Conservatoire par courrier du 10 février 2022 », a détaillé Michel Muracciole.
Le projet d’acquisition foncière par le Conservatoire du littoral de deux parcelles (50 ha) d’emprise de la crête rocheuse dominée par le Lion et la tour génoise du site classé de Roccapina, a été déclaré d’utilité publique par arrêté préfectoral en date du 18 mars 2022. Il n’y a pas eu appel de la DUP du préfet.
« Nous restons dans l’attente de l’ordonnance du juge de l’expropriation qui rendra le Conservatoire propriétaire de fait dans l’attente du règlement du prix qui sera proposé. En l’absence d’accord du propriétaire, le juge de l’expropriation sera saisi pour une fixation judiciaire du prix. »
Lutte contre la spéculation foncière et le tourisme de masse
Ce samedi 22 octobre lors d’une conférence de presse, le parti Femu a Corsica a expressément demandé à la société Bubika qui pour rappel est détentrice du site « de restituer au peuple corse ce qui lui appartient de droit ».
Au vu de la médiatisation récente du sujet cette conférence s’inscrit dans la lutte contre la spéculation foncière et le tourisme de masse. « Le patrimoine doit rester dans la sphère publique. L’objectif est que le Conservatoire du littoral puisse mener à bien la procédure d’expropriation » a également déclaré Laurent Tramoni, secrétaire territorial du parti dans le Sartenais-Valincu-Taravu.
Dans ce cadre, et afin de porter encore plus loin cette revendication, les élus du groupe Fà Populu Inseme déposerons une motion en ce sens, à la session de l’Assemblée de Corse des 27 et 28 octobre.
« Femu a Corsica réaffirme son attachement à la maîtrise foncière publique, notamment en matière environnementale et patrimoniale ; soutient la procédure d’expropriation pour cause d’utilité publique engagée par le Conservatoire du littoral ; dénonce l’attitude irresponsable de la société Bubika, empêchant la sauvegarde d’un monument historique de notre patrimoine ; rappelle l’importance de la préservation du patrimoine corse dans son ensemble, dans une démarche de sauvegarde de notre histoire et de notre culture ; réaffirme que ces terres ont vocation à réintégrer le domaine public de la Collectivité de Corse, institution garante des intérêts matériels et moraux de la Corse et de son peuple. » •