I messaghji d’Edmond Simeoni

Corse/France

« On peut dire sans outrance que l’ADN de notre peuple est bien résistance et liberté » disait Edmond Simeoni avec fierté. Défenseur infatigable de ce petit peuple maintes fois assailli, au cœur de la Méditerranée, il voulait faire prendre conscience aux Corses que le salut est en eux, dans la force collective à puiser dans plus de deux siècles et demi d’une Histoire tumultueuse. Il savait résumer en quelques lignes ces 250 ans d’affirmation collective. Ainsi il témoignait des rapports Corse/France le 29 août 2018, depuis Lozzi au cœur de son Niolu natal. Les plus anciens d’entre nous connaissent ce discours par cœur. Les plus jeunes ont toujours besoin de l’entendre pour le transmettre à leur tour. C’est sur ce socle qu’il nous faut bâtir « u paese da fà ».

 

« Notre relation avec la France est particulière ; celle-ci nous a privés de notre liberté par la force de ses armes – disproportionnée – en 1769, à Ponte Novu alors que nous étions une Nation indépendante depuis 1755, sous la conduite du père de la Nation, le général Pascal Paoli, Patriote, lucide, législateur, visionnaire et surtout homme du siècle des lumières. Il a été à l’origine de la Constitution de la Corse, en avance sur son temps et dans le même tempo que l’Amérique. La France a pratiqué en Corse une répression féroce et très grave jusqu’en 1812.

Le relais a été pris par une politique de francisation forcenée, à l’aide surtout de son système éducatif, qui a été acté partout en France et en particulier dans les colonies, par l’éducation nationale.

Pendant deux siècles, la politique d’assimilation a fonctionné à plein régime ; l’exode a été la règle pour alimenter la fonction publique métropolitaine et coloniale. La Corse a toujours été d’une loyauté totale envers la tutelle française.

Quand, en 1960, a commencé une mise en valeur coloniale – dans les domaines de l’agriculture et du tourisme – le peuple corse a été dessillé et nous avons entamé, avec d’autres, une lutte ferme et responsable – avec une répression sévère à la clef – pour une émancipation nationale qui pour nous n’a jamais varié : lutte légale, reconnaissance du peuple corse et Statut d’autonomie de plein droit, dans le cadre d’un contrat renégocié avec l’État français et inséré dans l’Union européenne ; les pouvoirs régaliens resteront du domaine de l’État et/ou, demain, de l’Europe, par exemple : la Défense nationale ou les Affaires étrangères, comme aujourd’hui, la monnaie de l’Euro nous rattache à l’Union européenne.

Nous avons, en Corse, un consensus populaire croissant avec des victoires électorales majeures et démocratiques – la ville de Bastia, la Collectivité de Corse – tandis que, dans le cadre de la Conférence des Régions Périphériques Maritimes (CRPM), la Corse a été choisie à l’unanimité pour présider l’institution, dans le but de renégocier avec l’Europe la prise en compte réelle des handicaps des régions montagneuses, des îles, en retard de développement.

Nous avons les moyens de nos ambitions : dix milliards d’euros d’épargne, des richesses naturelles considérables, des ressources humaines de qualité tant dans l’île que dans la diaspora.

L’État nie, contre toute vraisemblance le caractère politique de la « question corse » qui lui est posée avec insistance depuis plus d’un siècle. Cette attitude réaffirmée, martelée, nous a permis de préciser, une fois de plus, notre ligne de conduite : nous n’allons pas nous radicaliser ; nous allions construire, légalement, une vraie démocratie, et bâtir une économie moderne, assise sur l’éducation, la formation, sur les valeurs de l’humanisme pour un développement durable, avec notamment les nouvelles technologies, l’agriculture biologique, les énergies renouvelables…

L’internationalisation de l’information ainsi que la recherche de partenariats économiques, de solidarités, est déjà et sera demain une tâche prioritaire. Adossés au droit légitime de notre peuple, au droit international – principe d’autodétermination – nous ne renoncerons pas et nous savons que la marche vers la liberté pourra être entravée mais que la victoire de bon sens – la France est isolée dans son système jacobin et colonial – est inéluctable à terme ; la Corse sera libre, plus juste et dans la paix. » •