Ghjustizia

La machine judiciaire qui a aspiré Fabienne Giovannini

La machine judiciaire qui a aspiré Fabienne Giovannini sur plainte des battus de l’élection municipale de Bastia en 2021, tenue alors que sévissait l’épidémie du Covid, a finalement rendu son verdict. C’est une peine très limitée qui lui est infligée, sans commune mesure avec les hauts cris de ceux qui ont crié à la fraude électorale.

Le Tribunal a retenu une infraction concernant l’envoi d’un courrier entre les deux tours de l’élection municipale. À aucun moment il ne s’est interrogé sur la durée de cet entre-deux tours, une semaine en temps normal, trois mois dans le cas d’espèce du fait du renvoi sine die du second tour des élections municipales 2021 pour cause d’épidémie.

La période de réserve entre les deux tours est donc prévue pour durer normalement de sept jours. Est-il raisonnable de juger qu’elle devait être prolongée sine die, jusqu’à trois mois dans le cas d’espèce, et que, ce faisant, il fallait paralyser toute information des locataires de l’action de l’Office dès l’instant qu’il s’agissait d’accords signés avec le maire de Bastia ou le président de la Collectivité de Corse, lui-même candidat sur la liste ? D’autant que l’information, dont il est reproché à Fabiana Giovannini d’avoir fait état dans ce courrier, était celle d’un plan ambitieux de rénovation d’un habitat dégradé dont tous les locataires étaient impatients d’avoir connaissance ? Un courrier dont les débats n’ont par ailleurs pas pu établir qu’il est parvenu avant le scrutin et donc qu’il ait eu une quelconque influence sur celui-ci… comme elle s’en est défendue.

Durant toute la procédure, j’ai été convaincu que le tribunal tiendrait compte de ce contexte exceptionnel dans son jugement et qu’il prononcerait une relaxe, ou un simple rappel à la loi. Il en a décidé autrement, et on ne commente pas une décision de justice…

D’un autre côté, le procureur dans sa réquisition, et le juge dans son délibéré, ont pris en compte la personnalité de l’accusée et la peine finalement infligée ne va pas plus loin que celle que l’on réserve habituellement à une simple infraction routière.

Faire appel aurait relancé pour deux ans au moins les affres d’une procédure judiciaire, pour un résultat incertain. D’où la sage décision qu’elle a prise, sur le conseil de son avocat, d’en rester là (ci-contre son communiqué).

Cependant, alors que les violations de la loi sont légion, dans tant de domaines divers, de l’urbanisme à la fiscalité, en passant par toutes les formes connues de détournement de fonds publics, on reste étonné que la priorité de l’appareil judiciaire ait été donné à un tel dossier exempt de véritables enjeux quant au respect de la loi sur l’île.

Mais les voies de la justice en Corse sont impénétrables… •

F.A.

 


Comuniqué de Fabienne Giovannini

« Après en avoir parlé avec mon avocat, bien que je la trouve injuste, je ne ferai pas appel de la décision à mon encontre en date du 18 juin 2024.

Je suis fatiguée de devoir me justifier pour avoir essayé de faire mon travail avec peu de moyens dans un contexte extrêmement tendu, en pleine épidémie de Covid où toutes les procédures ordinaires étaient balayées, pour la gestion d’un organisme où il fallait faire face à toutes les urgences.

Je le répète inlassablement depuis trois ans : je n’ai jamais voulu porter atteinte à la sincérité du scrutin. J’ai agi en fonction d’un seul calendrier : celui interne à l’Office Public de l’Habitat. Je n’avais qu’une seule préoccupation : les difficultés des locataires.

Je n’étais pas candidate, pas impliquée dans la campagne électorale, je n’étais redevable que de ma volonté d’agir pour le bien des locataires envers qui j’avais pris les engagements qui figurent dans ce courrier et qui étaient enfin réalisables avec les moyens nouveaux obtenus que je m’étais engagée auprès d’eux à arracher.

Je me suis toujours battue contre la fraude électorale, pour le respect de la démocratie et pour la solidarité envers les plus démunis. Tout mon parcours politique le démontre quel que soit le poste que j’ai pu occuper par le passé. Tous celles et ceux avec qui j’ai travaillé, quelles que soient leurs opinions politiques, peuvent en témoigner.

J’en profite pour remercier tous mes soutiens et particulièrement les personnes, de toutes tendances politiques, qui ont produit des attestations de moralité. Et bien sûr mon avocat qui m’a accompagnée dans cette épreuve.

J’ai subi une perquisition humiliante à mon domicile, 10 heures de garde à vue, une mise en cellule, l’épluchage de mes notes téléphoniques et de mon ordinateur, de gros titres dans la presse, trois ans d’opprobre pour un courrier qui n’avait vocation qu’à informer l’ensemble des locataires de Haute-Corse de l’OPH (pas seulement Bastia), seul moyen en période de pandémie de faire part des engagements pris et de leur cadre ; alors qu’il n’est même pas prouvé qu’il soit parvenu aux locataires avant le scrutin !

Aujourd’hui je suis épuisée, y compris financièrement, et je ne souhaite pas davantage mobiliser les moyens de la Justice pour me faire entendre. Je crois que l’amende qui m’est infligée suffit à démontrer à quel point les accusations qui me mettaient soi-disant au cœur d’un complot électoral dont j’aurais été la pièce maîtresse ne tenaient pas.

Les gens qui me connaissent savent que j’ai mon honneur intact.

Je n’ai qu’un seul regret, ne pas avoir pu porter au bout la réorganisation interne et le plan de relance que j’avais mis en place au sein de l’Office Public de l’Habitat avec la Direction de l’époque. Après deux années de grandes difficultés et d’efforts intenses, il était une feuille de route approuvée à l’unanimité par (chose rare) les deux syndicats de l’organisme, par ses partenaires institutionnels, et par l’ensemble des membres du Conseil d’Administration de l’OPH2C, lui ouvrant de bonnes perspectives de développement.

Je paie mon dévouement pour les locataires et pour cette mission. Il est navrant pour la société corse toute entière que de tels messages puissent être adressés à tous ceux qui n’ont pour seule arme que leur honnêteté et leur bonne volonté. » •

Fabienne Giovannini.