Jean Félix Acquaviva, député de la seconde circonscription de Haute-Corse, a défendu, en séance publique de l’Assemblée nationale, un amendement au projet de loi de Finances 2023 déposé par le groupe Liberté Indépendants Outremer et Territoires sur la question des plus-values immobilières en matière de résidences secondaires. L’amendement a été adopté à une large majorité par 181 voix contre 120, sur 301 suffrages exprimés, contre l’avis du gouvernement ! C’est dire si le gouvernement est en décalage avec les attentes de nombre de territoires et de leur représentation élue. Ce n’est d’ailleurs pas la première fois que le gouvernement est rappelé à l’ordre par l’Assemblée nationale sur cette question de la lutte contre la spéculation immobilière grâce à l’action des députés de la Corse. « C’est la seconde fois qu’une large majorité se dégage à l’Assemblée nationale sur une taxe sur les plus-values immobilières puisque la proposition de loi que nous avons porté en février dernier et qui avait été adopté en première lecture contenait déjà cette mesure » a commenté Jean Félix Acquaviva. « Dans le cadre des discussions avec le Gouvernement sur le texte final à venir de la loi de Finances 2023, nous lui avons fait une nouvelle proposition de taxe plus-value. Cette nouvelle proposition étend la taxe à toutes les régions françaises, dans les zones à forte attractivité touristique notamment. Le risque d’anti-constitutionnalité est ainsi écarté. Ce n’est donc plus un argument. Le gouvernement doit entendre cette demande partagée sur de nombreux bancs. Nous devons mettre des freins à cette spéculation pour préserver le droit au logement des résidents. »
Voici son intervention devant l’Assemblée.
« La Corse, à l’instar d’autres territoires, subit une pression foncière et immobilière galopante. Une logique de spéculation foncière qui exclut puisque la création de valeurs liées aux ventes et aux reventes de résidences secondaires devient indue, puisqu’elle exclut du droit au logement ou du droit à l’accession à la propriété ceux qui ont décidé de vivre durablement sur ce territoire. C’est pour cela qu’on parle même dans cet amendement de zone de sur-spéculation immobilière tellement la croissance de prix devient frénétique : + 138 % en 10 ans, contre 65 % d’augmentation en moyenne française. Cela devient gabegique, cela devient déraisonnable. Aussi, cet amendement fait partie d’une série de propositions visant à – non pas taxer le stock, non pas taxer la valeur – mais taxer, majorer la plus-value immobilière, donc le flux et le bénéfice considéré comme déraisonnable en la matière, pour le rendre raisonnable. Faire en sorte qu’en deçà de cette majoration de plus-value, il y ait une baisse des prix, voire que ces ressources servent aux politiques d’accession à la propriété, au logement intermédiaire, au logement social. C’est le sens de cet amendement, en espérant qu’il trouve l’écho favorable de cette assemblée. J’associe bien sûr à cette proposition l’ensemble des territoires, basque, breton et autres, que je n’oublie pas et qui subissent le même problème. »
Amendement adopté contre l’avis du gouvernement
Le président de la commission des Finances Eric Coquerel (France Insoumise) a soutenu dans le débat l’amendement « à titre personnel ». De même que Laurent Marcangeli, député de la première circonscription de Corse du Sud ainsi que Jean Paul Mattei, président du groupe MoDem.
Le ministre chargé des Comptes publics Gabriel Attal, invoquant l’anti-constitutionnalité de l’amendement, a renvoyé toutes mesures de spécificité fiscale aux discussions entamées entre le gouvernement et la Collectivité de Corse. Il a défendu en contrepartie, comme le rapporteur général, Jean René Cazeneuve, une proposition d’extension du zonage de majoration de la taxe d’habitation.
Le gouvernement a donc demandé le retrait de l’amendement. Ce à quoi, Jean Félix Acquaviva a répondu.
« J’entends l’extension du zonage pour permettre de surtaxer la taxe d’habitation, mais je voudrais quand même sur ce débat important qui ne concerne pas que la Corse, c’est pour ça qu’il est important de l’avoir ce soir, et ce n’est pas la première fois que nous l’avons d’ailleurs sur la spéculation foncière et immobilière. La surtaxation de la taxe d’habitation sur les résidences secondaires ne vise pas à lutter contre la spéculation. Elle vise à faire contribuer justement les résidences secondaires au coût des infrastructures de ces communes. Réseaux d’électrification, réseaux d’eau, réseaux d’assainissement, qui sont dimensionnés en fonction du pic touristique. Donc c’est une logique de péréquation fiscale favorable, au rythme de vie de la cité et de leurs projets communaux. Cet outil-là, dont je rappelle qu’il a déjà été adopté dans la proposition de loi votée en première lecture le 4 février 2022, et qui a trouvé l’accord d’autres groupes ici, vise à taxer les flux, les transactions immobilières, les plus-values indues. Surtaxer les taxes d’habitation, nous sommes tout à fait d’accord, mais ne freinera pas le phénomène de revente et de vente qui fait monter les prix et qui exclut. Donc je vous invite véritablement, à l’instar de ce qui a pu être voté sur les dividendes ou d’autres sujets, sur la question de la taxation sur les flux et les plus-values indues, à avoir une réflexion beaucoup plus affinée, parce que c’est la demande majoritaire des élus de la Corse. »
L’amendement a donc été adotpé contre l’avis du gouvernement. Bravo ! •