par François Joseph Negroni
L’avenir énergétique de la Corse se joue maintenant. Alors que le monde s’oriente vers une décarbonation nécessaire, la Corse se retrouve à un tournant. Dépendante d’une production majoritairement fossile, l’île doit non seulement répondre à ses besoins actuels, mais surtout préparer un futur énergétiquement autonome.
La Corse dépend à 45 % de centrales au fioul pour son électricité. Les interconnexions SARCO et SACOI, qui permettent l’importation de 25 % d’électricité d’origine majoritairement nucléaire, pallient partiellement ce déficit. Mais l’essentiel de notre consommation énergétique est produit localement. L’isolement énergétique de l’île – une réalité physique due à l’absence d’interconnexions avec le continent, hormis les deux liaisons citées – pèse lourdement sur la gestion de ces défis. Cet état de fait n’est pas seulement un problème technique, il est politique.
La Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) pose un objectif ambitieux : l’autonomie énergétique à l’horizon 2050. Mais cette ambition doit être portée par une volonté politique forte, et non se limiter à un cadre technique imposé par l’État. L’enjeu de la transition énergétique pour la Corse dépasse les logiques de rendement : il touche à l’essence même de notre rapport à la terre et à nos ressources.
Pour atteindre cet objectif, deux leviers majeurs sont à mobiliser. D’abord, la réduction de la consommation énergétique, notamment dans le secteur résidentiel et tertiaire, où le chauffage et la climatisation représentent près de 50 % de la demande. Les bâtiments passoires thermiques, que Paris a longtemps négligé, doivent être rénovés en priorité.
Ensuite, il est urgent de massifier la production d’énergies renouvelables. Actuellement, les énergies vertes représentent seulement 30 % de notre mix énergétique. C’est un début, mais largement insuffisant face aux défis de demain. Là encore, l’État bloque les initiatives locales, notamment en limitant la part des renouvelables à ce niveau, sous prétexte d’un risque technique lié à l’intermittence.
Plus encore, les projets d’agrivoltaïsme ou l’utilisation de friches pour y implanter des panneaux solaires sont des pistes prometteuses, mais qui, là aussi, nécessitent une véritable autonomie de gestion.
L’autonomie énergétique, bien plus qu’un objectif technique, est une revendication politique légitime. La transition énergétique, ici plus qu’ailleurs, doit s’appuyer sur un modèle respectueux de notre terre, de nos ressources et de nos habitants. •