I messaghji d’Edmond Simeoni

Aggiornamento

Le 14 août 1977, à son retour de prison après les événements d’Aleria, Edmond s’adressa aux 10.000 militants rassemblés à Furiani pour la création de l’Union du Peuple Corse. Des paroles qui sont un héritage, une voie tracée pour bâtir la Corse de demain : « J’ai trois passions : la démocratie, la vérité et la justice. J’ai deux pratiques : le devoir et le sacrifice. Hier librement consenti et renouvelable demain. J’ai trois objectifs : sauver le peuple corse ; promouvoir la fraternité avec tous les autres peuples, et bien entendu avec le peuple français qui est doublement frère ; préserver et conforter la paix civile. Vous ne me devez rien ; ni culte, ni reconnaissance, mais par contre, vous devez tout à votre pays. » 10 ans plus tard, le 29 juin 1987, il faisait son aggiornamento, et appelait (hélas en vain) l’ensemble de la classe politique à le suivre.

 

« Je me place d’emblée sous le signe d’une double fidélité. D’abord à la paix, à l’humanisme, à la fraternité. Ensuite à la terre de Corse et à notre communauté, partie intégrante de la communauté des hommes. La Corse est malade de la violence ; raccourci simplificateur elle est un drame pour ceux qui la subissent mais aussi pour ceux qui la pratiquent parce qu’ils sont souvent désespérés. L’expliquer ne consiste pas à justifier la violence qui devient le bouc-émissaire de toutes les difficultés, l’alibi de tous les conservatismes et du refus de la moindre novation.

(…) Fréquemment les gens de bonne foi et d’autres moins désintéressés m’attribuent une large part de responsabilité dans la situation actuelle de la Corse. J’accepte le reproche. En effet, il y a bientôt 20 ans, je n’aurais pas dû avec mes camarades – je ne peux évidemment parler qu’en mon nom – occuper des bâtiments publics, barrer des routes, m’insurger, m’affronter 50 fois avec les forces de l’ordre : j’aurais toujours dû garder, en paroles et en actes, le sens de la mesure ; j’aurais dû être plus tolérant et moins partisan ; je n’aurais pas dû occuper la cave d’Aleria en 1975 où sont morts deux hommes jeunes et où un autre a été gravement blessé. La Cour de Sûreté de l’État, peu suspecte de complaisance à mon égard, m’a certes blanchi du meurtre et de complicité en ce qui concerne les deux gendarmes, mais, depuis cette date, j’ai la conviction charnelle, car ces hommes sont morts sous mes yeux, qu’aucune cause au monde n’autorise des blessures et a foriori la mort. Je mesure, soyez-en sûrs, le caractère puéril et l’angélisme de mon propos, et pourtant ma conviction sur ce plan est inébranlable. Je regrette de ne pas avoir été assez efficace pendant mon court mandat à l’Assemblée de Corse et je ne conserve aucune rancune à quiconque pour mes séjours en prison et pour les graves attentats que ma famille et moi-même avons subis. Nous laisserons le soin à la population et peut-être à l’Histoire d’alourdir si besoin est, ce bilan autocritique, de mettre à jour mes motivations et de déceler les éventuels aspects positifs de l’action que nous avons menée. À cette contribution publique, je convie de façon fraternelle, non polémique et suivant la même méthode tous ceux qui depuis 50 ans ont exercé des responsabilités en Corse, à tous les échelons de la vie publique ; j’y convie aussi les gouvernants, les Corses eux-mêmes, les non-Corses et, pour une période plus récente, les militants clandestins, de façon anonyme bien sûr. L’opinion pourra ainsi juger s’il y a eu ou s’il y a encore des atteintes à la démocratie, si l’acculturation des Corses est une réalité ; si le sous-développement économique existe ; si les promesses officielles ont été toujours tenues ; si les fruits de l’expansion ont été équitablement répartis ; si les droits de l’Homme ont été bafoués en Corse ; s’il existe des injustices sociales majeures et s’il y a eu du racisme anti-corse ; si les conditions de parité et de progrès ont été créés ; si le fonctionnement de la justice a été satisfaisant, s’il y a eu des polices parallèles, etc., nous saurions aussi alors quels sont les éventuels responsables…

Nous devons essayer de façon concomitante et inévitablement imparfaite de concilier quatre objectifs :
– 
promouvoir et enraciner la paix
– 
perfectionner la démocratie
– 
amorcer le développement économique et social
– 
conforter et ouvrir la culture corse sur toutes les cultures et en particulier sur la Méditerranée, notre berceau naturel. » •