D’après les premiers sondages, la dissolution voulue par Emmanuel Macron se transformerait en triomphe pour le Front national. Il nous reste une semaine à peine pour conjurer cette sinistre prédiction.
Les « humeurs » des peuples sont un mystère de l’Histoire, et la science politique consiste justement à les anticiper en menant les gouvernances adaptées. Le septennat d’Emmanuel Macron a été un incontestable échec à cet égard.
La « mauvaise humeur » du peuple français s’était déjà faite entendre avec force lors des manifestations des gilets jaunes, dès 2018 et jusqu’au confinement, début 2020. Ce signal d’alarme n’a pas été entendu. La pandémie y a ajouté de l’anxiété et des radicalisations nouvelles (mouvement anti-vaccins par exemple), et elle a mis à jour, à travers notamment la dramatique situation dans les hôpitaux, les carences béantes des services publics les plus essentiels, alimentant la colère et l’amertume.
Puis est venu l’épisode désastreux du débat sur la réforme des retraites qui a cristallisé le divorce entre le pouvoir, de plus en plus incarné quasi-exclusivement par Emmanuel Macron, et des pans entiers d’une société aspirée par la désillusion, notamment parmi les « corps intermédiaires », cette structure informelle qui organise de facto la vie sociale d’un pays. La marginalisation autoritaire du mouvement syndical le plus porté au dialogue, incarné par Laurent Berger (CFDT) ou Philippe Martinez (CGT), a été une très grande erreur.
De rupture en rupture, le lien entre le peuple et son gouvernement s’est rompu, installant cette « humeur » malsaine qui jette les français dans les bras de l’extrême-droite. Le mouvement est profond et les discours les mieux construits ne suffiront pas à en dissiper rapidement les effets. Mais ils peuvent éventuellement, espérons-le !, empêcher le franchissement de certains seuils qui seront ensuite très difficiles à remettre en question.
Les physiciens connaissent la loi du « changement d’état », quand l’eau liquide devient glace. Le basculement d’un état à l’autre ne se fait pas à zéro degré, mais à -4°C. Ensuite il faut remonter à +4°C pour retrouver l’état liquide par la fonte de la glace. Aujourd’hui, en France, il fait presque -4°C ! Et il faudra ensuite remonter une pente très dure pour renverser la tendance si l’élection qui vient nous fait franchir ce seuil fatidique.
Cette « glaciation » de la société française n’épargne pas la Corse, loin de là. Depuis que les nationalistes ont pris le pouvoir régional, nous avançons, mais très nombreux sont ceux qui pensent que ça ne va pas assez vite. Pourtant l’Exécutif s’active : négociation réussie sur l’autonomie, et soutien à bras le corps de pans entiers de la « maison Corse ». Les transports qu’il faut consolider, notamment la situation d’Air Corsica, la dérive des comptes publics qu’il faut endiguer au prix de mesures fatalement impopulaires, l’appui décisif à Scola Corsa pour l’avenir de la langue corse, mais aussi les situations d’échec comme sur les déchets, ou les attentes légitimes mais hors de portée d’un pouvoir régional aux compétences très limitées (pouvoir d’achat),, etc. : les motifs de frustration sont multiples et alimentent un mécontentement latent. Mais celui qui trouve qu’avancer à 30 km/heure n’est pas suffisant veut-il pour autant enclencher la marche-arrière toute ? Probablement non, mais l’improbable est parfois devenu réalité ! Par exemple au Royaume Uni quand une majorité a approuvé le Brexit qu’elle regrette manifestement désormais.
Pour la Corse, la feuille de route est simple : maintenir et si possible renforcer l’équipe de députés qui nous représentent à Paris, au sein du Parlement dont dépend la réforme constitutionnelle qui permettra de mettre en œuvre les accords de Beauvau passés entre l’État et la Corse.
De la sorte la question de l’autonomie de la Corse restera à l’agenda de ceux qui gouverneront à Paris, nous laissant l’espoir d’une mise en œuvre réussie de ces accords.
Sinon, c’est le saut dans l’inconnu !
Forza à tutti i nostri candidati ! Forza pà a vittoria di u pòpulu corsu ! •