par Max Simeoni
Il serait temps que les autonomistes cessent de marcher la tête en bas. Simplifions pour souligner une évidence.
Les autonomistes ont créé une organisation politique pour empêcher la disparition du peuple corse voulue par la République française dont l’idéologie, un seul peuple, un seul État, une seule langue officielle, nie les autres peuples sur son territoire conquis le plus souvent par les armes. Niant leur existence juridique, ils n’ont aucun droit. La France devant être l’exemple d’un monde nouveau aux valeurs universelles qu’elle incarne. Elle a érigé un Empire colonial avec cet alibi. Elle disait amener la civilisation, le progrès plus qu’elle ne colonisait. Jules Ferry, fondateur de l’école publique, laïque, gratuite et obligatoire, n’était-il pas un colonisateur convaincu ?
N’a-t-elle pas avec la Révolution de 1789, décapité son Roi de droit divin et enterré les féodalités ? Avec le recul on peut se rendre compte que ce n’est pas le tiers-État qui a pris le pouvoir détenu par la noblesse, mais la bourgeoisie sans pouvoir institutionnel mais qui s’est enrichie. N’est-ce pas le premier pas de la fin de l’hérédité par le sang et les fiefs vers des détenteurs et producteurs de capitaux ? Aujourd’hui on fait travailler l’argent pour en accumuler toujours plus et toujours plus de pouvoir. La classe des financiers n’a aucune limite pour ce faire ! Les gros absorbant les petits. Son champ d’action est la planète, « là où on a besoin de capitaux pour se développer ».
La terre avec ses terres seigneuriales, ses ouvriers agricoles, voire ses serfs, reste une valeur mais les ouvriers s’entassent ailleurs dans les usines, les montages à la chaîne. Les seigneurs sur leurs terres, ont laissé la place aux financiers d’entreprises qui achètent des châteaux, les aménagent pour leurs vacances avec leurs enfants. Hors de portée pour tous ceux qui travaillent pour vivre…
Et notre île ? Et notre peuple à sauver disparaîtra-t-il ou survivra-t-il ?
Sa position en Méditerranée pose un problème majeur de sécurité à l’État français, et avec la perspective d’une Europe à construire politiquement, à l’Europe dont la façade des États du Sud-ouest sont en première ligne. Une indépendance leur est inacceptable.
L’île indépendante pourrait accueillir des éléments de surveillance et de logistique militaire… hostiles. L’État républicain a implanté la légion étrangère. Les règlements prévoyaient, du temps de l’Empire colonial, qu’elle ne pouvait pas prendre pied en « métropole ». Bizarre non ? Elle se livre avec les Saints Cyriens à des manœuvres inter-armes, dernièrement en Balagne et sur les rives du golfe de Portivechju.
Les Corses quittaient leurs villages, leur île. L’État républicain les avait persuadés qu’elle était certes belle, sauvage, mais stérile. Ils s’exilaient et étaient reconnaissant envers la République qui leur offrait des carrières dans son Empire et ses armées, dans son administration malgré leurs différences. L’île se vidait (160.000 habitants en 1962). Ils s’affichaient comme des super français et mettaient en avant « le prix du sang versé ». Parfois mécontents à titre individuel, ils marmonnaient « sò pinzuti », « un pònu capisce »…
En 1962 à Evian, le Général de Gaulle signe l’indépendance de l’Algérie.
Fin de l’Empire colonial, l’État républicain se trouve face à une autre perspective : l’Europe politique à faire entre des États hier encore concurrents et belligérants, instigateurs de conflits mondiaux (guerres de 14-18 et de 39-45). Les pères fondateurs ont estimé qu’il fallait commencer par l’économie (charbon/acier, énergies…). On en est après des années toujours à l’Europe des États.
La République assigne à l’île une fonction de tout tourisme, soit disant moteur d’un développement moderne pouvant apporter prospérité et bien être à tous ses habitants.
Mensonge cynique de cette République. L’ARC a publié le rapport secret de l’Hudson Institute en 1973/74 qui prouve que des deux sur quatre des scénarios proposés, elle a choisi celui qui misait sur la disparition rapide des restes du peuple Ccorse (250.000 lits à créer en 15 ans de 1971 à 1984, encadrés de 70.000 techniciens à faire venir). Elle a choisi la mort du peuple corse pour disposer de la terre insulaire. Un génocide par le moyen socioculturel. Le rapport connu, il fût rejeté par les Corses. Il avait été voté en 1971-72 en Conseil des ministres pour 15 ans, 71-84 comme schéma de l’aménagement de la Corse. On n’en parla plus mais ce génocide se poursuit sur un tempo plus lent qui abuse les acteurs socioéconomiques.
Les chiffres parlent : la population de l’île est en croissance par des apports extérieurs (5.000 arrivants par an), les autochtones vieillissent, les indivisions du fait des arrêtés Miot rendent les successions sujets à de longues recherches et poussent les énièmes générations à s’en débarrasser par la vente de leurs parts à bas prix, ce qui ouvre la porte à la spéculation et aux pressions.
L’île est une enclave dépendante (plus de 97 % de sa nourriture est importée avec l’aide de la DSP (délégation de service public). Les compagnies de transports maritimes et aériens sont subventionnées.
L’île est la dernière colonie… à décoloniser. Elle l’ignore, et au jour le jour, les Corses écrasés par la vie chère ne peuvent se mobiliser pour des processus à 10 ou 20 ans.
L’astuce de ce pouvoir centralisé et jacobin de cette République est d’avoir accordé des statuts spéciaux (Defferre, Joxe, Jospin et Cazeneuve) qui semblent autant de pas vers plus d’autonomie. Trompe l’œil. L’île est la plus pauvre des régions de l’Hexagone.
Il manque un vrai pouvoir : l’autonomie interne, et cela rend le peuple corse nié, impuissant.
Ce pouvoir et cette reconnaissance ne peuvent être qu’arrachés par les Corses (oui, oui, par eux mêmes car « on ne sauve pas un peuple par procuration »).
Comment y parvenir ? Aisé à comprendre, difficile à réaliser sur des ruines. La suite le dira. •