On en a longtemps rêvé durant de longues années de luttes… les relations officielles entre la Communauté autonome d’Euskadi (Pays Basque) et la Collectivité de Corse qui aspire aussi à l’autonomie « de plein exercice et de plein droit » sont désormais bien installées ! Le Lehendakari, président de la Communauté autonome, était en Corse ces 30 et 31 mai 2022, étape importante dans les fructueuses relations à venir entre les deux nations.
Dès la prise de responsabilité des nationalistes corses en 2015, et même avant, par l’intermédiaire de nombreux échanges entre partis nationalistes basques et corses depuis les années 70-80, ainsi qu’entre eurodéputés, puisque le nationalisme corse siégeait au Parlement européen dès 1989 (avec Max Simeoni) puis de 2009 à 2014 avec le premier mandat de François Alfonsi, et désormais avec son second mandat depuis 2019, notre île a toujours cultivé avec grand intérêt les relations avec le peuple basque.
Les nombreuses « Ghjurnate d’Arritti » en présence de personnalités de premier plan d’Euskadi l’attestent, qu’ils soient responsables politiques, ou du monde culturel ou économique. Ces relations sont souvent passées d’ailleurs par l’intermédiaire de Joxe Marì Munoa, qui était alors le porte-parole du Lehendakari dans les années 80-90, un intime du pouvoir basque, et un amoureux de la Corse qui est venu à trois reprises animer nos « Ghjurnate ». Sans oublier les relations avec l’Alliance Libre Européenne qui a ouvert plusieurs champs de possible. À la suite de tous ces échanges, ont été même engagées des constructions communes. Femu Quì, petite sœur de la société de capital-risque Hemen Herrikoa, en est la plus connue. Ou encore, plus récemment, Scola Corsa qui s’inspire du travail basque de la Fédération Seaska et de ses ikastolas, écoles associatives immersives en langue basque.
Le président du Conseil exécutif de Corse, Gilles Simeoni, avait été présenté par François Alfonsi à Iñigo Urkullu en 2019, lors d’un premier déplacement en Euskadi. Depuis, les relations entre les deux hommes ont été régulières. Mais c’est la première fois qu’un Lehendakari se déplace en Corse. Et c’est un grand honneur pour notre île.
Une visite au pas de charge puisque le président de la Communauté autonome d’Euskadi s’est attardé à Aiacciu, mais aussi à Corti, capitale historique avant de repartir de son périple par Bastia. Une visite officielle sur deux journées, les 30 et 31 mai, afin de nouer l’accord de collaboration entre ces deux nations d’Europe. Un « partenariat stratégique » pour la Collectivité de Corse. « Un piacè è un onore d’accoglie à a Cullettività di Corsica u Lehendakari, Iñigo Urkullu, Capiguvernu di u Paese Bascu, per una vìsita ufficiale di dui ghjorni » a commenté Gilles Simeoni sur Twitter.
Reçu officiellement dans l’hémicycle de l’Assemblée de Corse pour y rencontrer les élus, Exécutif, conseillers territoriaux, parlementaires, conférence de presse commune, rencontre avec des représentants de la société civile, visite de la Chambre de commerce et d’industrie de Corse puis des plateformes de recherche et d’innovation Myrte et Paglia Orba, visite du centre d’immersion linguistique de Sàvaghju, puis du Musée de la Corse à Corti et de l’Università Pasquale Paoli, un tour d’horizon destiné aux pistes de travail en commun, sur les questions qui lient les deux peuples, par un premier « Memorandum de collaboration » qui avait été signé en avril de l’année dernière. Il comprend des engagements communs sur cinq ans, avec notamment trois axes principaux de coopération : les affaires européennes, la langue, l’apport de la diaspora.
« Un premier jalon » avait commenté Gilles Simeoni qui entend élargir encore ces relations. Une visite en tous les cas, à la veille de l’ouverture de négociations de la Corse avec Paris, qui aura mis très fortement l’accent sur l’autonomie attendue, et annoncée par le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin en mars dernier.
Ce voyage dépasse la symbolique de deux nations qui aspirent à plus de liberté, il ouvre la réflexion sur nombre de pistes de travail en commun, sur le plan économique ou culturel. De la manière dont la diaspora basque est impliquée dans le devenir de cette nation, à la mise en place d’une liaison aérienne régulière entre Bilbao et la Corse, en passant par les enseignements de la politique de reconquête linguistique de l’euskara, ou les coopérations à développer au niveau européen, ces expériences ont de quoi inspirer les futurs politiques de la Collectivité de Corse. Gora Euskadi, Gora Corsica ! Evviva l’avvene di e nostre nazioni in Auropa ! •