Créée dans les années 70 il y a plus de 50 ans, à la fois à Corti, par Jean-Baptiste Stromboni qui espérait pouvoir développer un réseau d’enseignement associatif immersif en langue corse, et Carlu Castellani à Bastia, avec son combat pour faire intégrer la langue corse à la loi Deixonne pour l’enseignement facultatif des langues régionales, qui avait exclu notre langue en 1951, Scola Corsa (di Corti, o di Bastia) est l’association pionnière pour la défense de l’enseignement de et en langue corse.
Una storia di longa maturazione sbuccia.
Scola Corsa est de ces premiers combats de la période du riacquistu qui ont jeté les bases d’un grand mouvement de réappropriation décliné en différents domaines de l’affirmation identitaire, cantu, mùsica, teatru, literarura, sinemà, insignamentu… puis de manière plus politiquement structurée par le syndicalisme (Sindicatu di i Travagliatori Corsi, Sindicati di l’Insignamentu Corsu, Associu di i Parenti Corsi…), le combat pour la défense de l’environnement (U Levante, Le Garde, Le Comité anti-Vaziu…), ou encore les partis politiques nationalistes qui se sont affirmés au cours de ces plus de 60 ans maintenant de combat politique.
De son côté, après 40 années d’un travail remarquable au service de la langue et de la culture corses, Scola Corsa avait conservé une activité restreinte, autour de cours de langue corse pour adultes, notamment à Bastia, avec Fernand Olmeta, Antone Rabazzani puis Antoine Marielli comme intervenants ces 10-20 dernières années.
Sous l’impulsion d’un nouveau président Jean François Stefani, dans les années 2000, elle a accompagné également des projets tels que des programmes de cours pour adultes sur six sites sur le territoire corse dans le cadre du programme de formation continue de la Collectivité territoriale (2005-2006), puis des expériences de stages en immersion pour adultes (2012), ou encore le portage d’une démarche d’étude technico-juridique en vue de la création d’une école immersive associative (2013).
Avec les attaques incessantes du gouvernement tout au long de ces années, il manquait une ambition plus forte en matière d’enseignement et de réappropriation linguistique freinée dans ses besoins de développement. Notre île peine à former les corsophones de demain et sous la pression de l’État, les militants de la langue ne parviennent pas à inverser la tendance malgré un combat acharné pour faire évoluer le statut de la langue corse vers l’officialisation et lui donner ainsi un véritable rayonnement.
Nombreuses associations ont vu le jour, certaines n’ont pas résisté à l’usure du temps, d’autres sont plus dynamiques comme Parlemu Corsu, très engagé et qui vient de créer la toute première Currilingua, course en faveur de la langue corse. Ou encore Praticalingua, plus investie sur la région bastiaise avec ses divers ateliers en langue corse. Ainsi d’innombrables initiatives, débats ont été menés, des manifestations et actions de toute nature ont été conduites, mais en matière d’enseignement, la Corse a été plutôt à la traîne par rapport aux démarches de structuration qui ont été créées en faveur de leur langue dans les autres régions à forte identité comme l’Alsace, la Bretagne, la Catalogne, le Pays Basque Nord, l’Occitanie… En créant des écoles associatives d’enseignement immersif, puis le réseau Eskolim qui les fédère aujourd’hui, nos amis basques, bretons, alsaciens, catalans ou occitans, nous ont montré la voie.
Le mouvement identitaire corse, de manière générale, n’a pas pris cette voie lors du riacquistu et des années qui ont suivi, misant essentiellement sur le combat politique d’une langue corse officielle avec un statut qui lui permettrait de s’épanouir par l’enseignement public.
Hélas, cette porte nous a toujours été fermée politiquement, et le reste à double-tours, pendant que le déclin de la langue corse l’inscrit au patrimoine de l’Unesco des langues en grand danger de disparition.
Aussi, forts du soutien aujourd’hui d’un combat gagné au niveau électoral, pouvant s’appuyer désormais sur une volonté institutionnelle d’accompagner un projet de plus grande ampleur, différents acteurs de défense de la langue corse se sont regroupés pour impulser une nouvelle dynamique dans le domaine de l’enseignement, mais pas seulement.
Et quel plus beau slogan que celui de Scola Corsa pour le conduire ?
L’association Scola Corsa (sa branche bastiaise) s’est ainsi renouvelée en 2020, elle a vu le renfort d’enseignants, d’universitaires, d’écrivains, de journalistes, d’artistes, et de militants de tous horizons, avec la volonté de créer en Corse aussi une filière d’enseignement immersif.
En décembre 2019, François Alfonsi, à l’appui d’une motion adoptée à une large majorité lors de l’AG Femu a Corsica, propose le projet d’une démarche associative d’enseignement immersif à l’ensemble des organisations qui défendent ou promeuvent la langue corse (Praticalingua, AILCC associu di l’insignanti di lingua è cultura corsa, l’APC associu di i parenti corsi, le Collectif Parlemu Corsu, le STC Educazioni…).
Autour de Ghjiseppu Turchini, Ghjuvan’Petru Luciani, Lisandru De Zerbi, Micheli Leccia, Ghjuvanna Julien, Denis Luciani, Jean-François Stefani, Muriel Beltran, Noël Tomasi, Rumanu Giorgi, Marilyn Massoni, François Leonelli, Dumènicu Delporto, Alain Gherardi, Pasquale è Marc’Andria Castellani, Nadine Nivagioni, Brandon Andreani, Muriel Beltran, Antonia Luciani, Jean Charles Giabiconi, Laura Ferrandini, Lionel Dumas Perini, Fabiana Giovannini, et bien sûr François Alfonsi, le projet murit patiemment.
En novembre 2020, François Alfonsi organise un déplacement au Pays Basque nord (Bayonne/Biarritz). C’est l’élément déclencheur, en s’appuyant sur l’expérience des militants basques, puis sur la dynamique municipale créée dans deux communes volontaires.
Ainsi, la nouvelle équipe de Biguglia, emmenée par son maire Jean Charles Giabiconi, fraîchement investi en 2020, s’est immédiatement positionnée pour travailler au projet, en proposant notamment des locaux flambants neufs, parfaitement équipés.
Bastia a embrayé immédiatement, sous l’impulsion notamment de Lisandru De Zerbi adjoint spécial à la langue corse, pour ouvrir sa propre école, à Toga.
Ainsi, le 27 février 2021, Biguglia a accueilli la première assemblée générale de Scola Corsa en tant que Federazione pour bâtir cette filière immersive.
Le 27 mars 2021, Scola Corsa accueillait, toujours à Biguglia, le réseau Eskolim qui regroupe l’ensemble des écoles associatives d’enseignement immersif en France : Alsace (ABCM), Bretagne (Diwan), Catalogne (Calendreta), Pays Basque (Seaska/Ikastola), Occitanie (Bressola) (lire en p.12).
Ce réseau compte parmi les meilleurs résultats de France au Baccalauréat, et dispose de son propre Centre de Formation (l’ISLRF, institut supérieur des langues de la République française) qui permet d’accompagner techniquement, juridiquement et sur le plan pédagogique l’ensemble de ses membres.
Ce 27 mars 2021, Scola Corsa est officiellement intégrée au réseau.
Dans la foulée, les deux écoles sont créées et leurs associations respectives déclarées au Journal Officiel, les enseignantes et les personnels ATSEM recrutées, les premières inscriptions d’enfants enregistrées.
Un nouveau voyage au Pays Basque est organisé en mai 2021 pour conforter les enseignantes et les équipes dirigeantes des deux écoles (lire en p.9).
L’appui de la Collectivité de Corse pour pourvoir aux premières années de mise en route, dans l’attente de la mise en place d’une contractualisation avec l’Éducation Nationale pour la prise en charge des salaires des enseignants, a été sollicité.
L’ensemble des maires de l’île, ainsi que le mécénat d’entreprises ou les contrats de partenariat, sont également appelés à soutenir la démarche et à donner à Scola Corsa les moyens de fonctionner ces premières années dans l’attente de cette contractualisation avec le ministère de l’Éducation Nationale.
La population est également invitée à participer à cette grande aventure à travers un appel de fonds, notamment sur le site HelloAsso (voir p.12).
Un site internet est en construction. De même qu’une démarche crowdfunding.
La filière Scola Corsa d’enseignement immersif est née ! Elle est appelée à grandir et à ouvrir de nouvelles écoles chaque année.
U scopu hè questu quì per dà forza è fiatu à a nostra lingua, offre strutture d’insignamentu sèrie è dinàmiche. Dà à a sucetà corsa i corsufoni ch’ella abbisogna. Pè u spannamentu di a nostra lingua, longa è bella Vita à u retale Scola Corsa ! •