le Parlement européen ratifie l'accord, à cause des socialistes, mais le combat n'est pas fini!

CETA

Mercredi 15 février, le Parlement européen a ratifié, d’une courte majorité, l’accord de libre échange entre l’Union Européenne et le Canada. Le chapitre de la ratification est clos au niveau européen mais la lutte contre le CETA, et le TTIP aussi, n’est pas finie!

 

Une courte majorité

408 voix pour, 254 voix contre et 33 abstentions. À première vue, il n’y a pas photo. L’accord de libre-échange entre l’Union Européenne et le Canada a été très largement ratifié par le Parlement européen qui avait, rappelons-le, le pouvoir légal et juridique de l’envoyer dans les limbes de l’Histoire.

Mais cette majorité ”écrasante” cache une toute autre réalité. Pour ratifier un accord commercial, le Parlement doit donner son ”approbation” sur l’ensemble du texte par un vote unique (oui, non, abstention). Et pour ratifier l’accord, le OUI doit rassembler une ”majorité absolue des membres du Parlement européen”. Soit 376 voix sur 751 députés et ce, quelque soit le nombre de députés présents en séance plénière. Or, avec 408 voix pour, la majorité pro-CETA n’était que de 33 voix, sur un hémicycle de 751 élus! Autrement dit, la majorité qui a ratifié le CETA est bien plus faible et plus fragile que ne semble le laisser croire le résultat ”brut”.

De plus, ce qui est intéressant, c’est de voir qui a voté pour le CETA. Premièrement, les 408 voix viennent principalement du groupe du Parti Populaire Européen (PPE – LR en France), des Conservateurs et Réformistes Européens (CRE – Conservateurs britanniques et polonais) et de l’Alliance des Démocrates et des Libéraux (ADLE – UDI-MODEM en France). Jusque-là, rien d’étonnant. Que des libéraux et néolibéraux soutiennent un accord de libre-échange, d’essence néolibérale, ne surprendra personne. Quoique! Ce sont souvent ces mêmes partis qui prétendent défendre les PME et qui viennent de les sacrifier sur l’Autel du ”big business”.

 

”Le cartel des droites”

Mais le ”cartel des droites” (PPE, CRE, ADLE) n’avait pas de majorité absolue au Parlement européen (environ 10% des députés issus de leurs rangs ayant fait défection) et le soutien décisif est venu des… Socialistes et Démocrates (S&D)! 94 des S&D ont voté pour le CETA, 66 contre et 13 se sont courageusement abstenus. Autrement dit, ce sont les socialistes européens qui ont fait passer le CETA! Sans leur vote, point de CETA! Tous les autres partis politiques, y compris les députés de l’Alliance Libre Européenne, ont rejeté le CETA, mais ce n’était pas suffisant.

Une fois le vote solennel sur le CETA acté, il y avait un autre vote, plus politique celui-ci mais légalement non contraignant. En effet, plusieurs résolutions politiques avaient été déposées afin ”d’expliquer” le sens du vote de chaque groupe politique. Sans surprise, les résolutions des groupes appelant à rejeter le CETA ont été rejetées par la majortié pro-CETA. Mais, plus intéressant, la résolution déposée par les socialistes, elle aussi rejetée, n’appelait explicitement ni à rejeter ni à valider le CETA mais émettait de vagues considérations qui, implicitement, soutenait la ratification de l’accord. Avant le vote, les socialistes avaient donc déjà annoncé la couleur! Enfin, la résolution politique commune du ”cartel des droites” qui assumait fièrement l’accord a, elle aussi, été rejetée (314 pour, 355 contre, 27 abstentions).

Autrement dit, le Parlement européen est pour le libre-échange, en général, et pour le CETA, en particulier, mais il est incapable d’en donner le moindre sens politique. Cette incapacité à trouver des majorités (larges) donne quelques espoirs quand les prochains accords de commerce seront à leur tour soumis à ratification. Le TTIP (UE-USA) ou le TISA (accord multilatéral sur les services) sont donc loin d’être ratifiés par le Parlement.

 

Le combat continue!

Mais revenons-en au CETA. Le vote du Parlement européen clôt (quasi) définitivement la procédure au niveau européen (le Conseil doit encore voter) mais le CETA est loin d’être définitivement ratifié. En effet, l’accord de libre échange avec le Canada n’est pas un accord ”simple” -qui nécessite une ratification du Parlement européen et un vote à la majorité qualifiée au Conseil- mais un accord ”mixte” -qui nécessite une ratification du Parlement européen, l’unanimité des Etats au Conseil et la ratification des Parlements nationaux et parfois même régionaux comme en Belgique.

Cette procédure, qui peut paraître lourde voire semée d’embûches, existe car, dans le cadre d’un accord mixte, la Commission européenne négocie au nom des Etats afin d’éviter 28 négociations en parallèle. Il est donc normal que chaque Parlement national ait un droit de véto.

Avec 38 vétos possibles, dont celui potentiel de la Wallonie, le CETA est encore loin d’être ratifié et la pression de la société civile doit perdurer pour que la procédure n’aille pas à son terme. En 2017, il y aura de nombreuses élections qui pourraient aussi permettre de faire dérailler le CETA.

 

Les socialistes européens ont permis au ”cartel des droites” de remporter une bataille mais ils n’ont pas encore gagné la guerre. Le combat continue! #StopCETA

 

Roccu GAROBY

Vice-Président de l’Alliance Libre Européenne Jeune