Cap'artìculu

Peser sur la présidentielle

L’élection présidentielle de 2022 s’annonce des plus incertaines. Si la prime au sortant est réelle, et sa réélection annoncée comme probable, la tournure du débat politique fait planer de sérieuses incertitudes. La France est elle aussi un pays devenu instable politiquement.

 

Cette évolution est européenne. Elle se fait en France après l’Italie, dont l’apparente stabilité actuelle tient au miracle temporaire d’un gouvernement qui rassemble des ministres de l’extrême droite, du centre, de la gauche et même ceux issus des forces « anti-système » du mouvement 5 étoiles. Ce cocktail étrange ne résistera pas au retrait politique de son premier ministre fédérateur Mario Draghi, figure politique internationale qui, au printemps prochain, devrait succéder au Président de la République italienne, Sergio Mattarella. Bien malin celui qui pourrait anticiper la suite.

En Espagne aussi, la crise catalane a tétanisé les débats politiques et elle menace de déstabiliser à tout instant le gouvernement socialiste de Pedro Sanchez qui serait minoritaire sans le soutien indirect des députés catalans de ERC et d’autres forces politiques basques ou galiciennes. Mais comme il reste totalement paralysé sur le dossier catalan, il peut chuter à chaque instant.

Quant à l’Allemagne elle passe du long leadership conservateur d’Angela Merkel à une alternance qui éjecte son parti du pouvoir au profit d’une coalition à trois couleurs de partis (le rouge des socialistes, le vert des écologistes et le jaune des libéraux) dont les accords seront notoirement difficiles.

 

En France aussi, l’instabilité s’est installée dans la vie politique de façon inédite. Le plus inattendu touche l’extrême droite qui en quelques semaines s’est divisée en deux blocs qui s’opposent désormais, entre Marine Le Pen, quelque peu émoussée par ses campagnes successives, mais à la tête d’un parti puissant, et Eric Zemmour, création médiatique surgie des tréfonds les plus sombres de l’histoire de l’extrême droite hexagonale.

À gauche, c’est « je t’aime moi non plus » entre Jean Luc Mélenchon qui fait sa course en solitaire dans le couloir contestataire, Anne Hidalgo qui sera intronisée par le parti socialiste à l’issue d’une vrai-fausse primaire, et Yannick Jadot sorti vainqueur de justesse de la primaire écologiste qui, avec la participation de 120.000 inscrits, a donné quelques couleurs au candidat vert.

Cette gauche, aujourd’hui sous les 30 %, pourra-t-elle trouver d’ici avril un niveau capable de porter un de ses candidats au second tour ? Anne Hidalgo s’appuie sur ce qu’il reste du Parti Socialiste, Yannick Jadot mise sur la popularité croissante des idées écologistes et Jean Luc Mélenchon espère une dynamique comme il l’a connue en 2017. Celui dont le potentiel de progression apparaît le meilleur est Yannick Jadot car l’écologie est au plus haut dans les attentes des français.

Quant à la droite, la primaire des Républicains apparaît trop minimaliste pour espérer évincer le véritable favori de ce courant d’opinion qui est désormais Emmanuel Macron.

 

Que faire d’utile dans ce contexte ? La stratégie de peser sur la campagne présidentielle afin qu’elle soit l’occasion de relancer l’engagement de l’État sur le dossier corse s’impose comme une évidence.

Sur les candidats qui tous feront leur tournée en Corse, pèseront bien sûr les 68 % des voix obtenues par les trois listes nationalistes, et la majorité absolue qui, à l’Assemblée de Corse, soutient Gilles Simeoni. En retour, les candidats déclarés vont probablement se faire plus conciliants, à commencer par Macron lui-même.

Quelles promesses seront alors possibles ? Car n’oublions pas que le statut particulier de 1982 était une promesse électorale de la présidentielle qui a vu la première élection de François Mitterrand, ainsi que l’amnistie des prisonniers politiques.

Qu’un candidat décide de mettre fortement la question de la Corse, et de la réorganisation du territoire en général à travers une véritable régionalisation dans un État fédéral, ne peut qu’aider à ce que ce thème soit présent dans la campagne de tous. Il sera l’aiguillon de tous les autres.

Yannick Jadot, le candidat des écologistes, alliés traditionnels de Régions et Peuples Solidaires, est manifestement prêt à le faire. •