Sacralisazione di u 5 di maghju

30 anni di lotta

Il aura fallu 30 longues années de bataille contre la fermeture incompréhensible, voire indécente, de l’appareil d’État en France, pour obtenir – enfin ! – la sacralisation de la date du 5 mai. Désormais, plus aucun match de compétition professionnelle de football en France ne sera possible un 5 mai. L’aboutissement d’un long combat.

 

C’est la reconnaissance des souffrances de milliers de personnes, l’hommage aux disparus, les 19 victimes, mais aussi leurs parents qui sont décédés depuis sans voir aboutir leur demande pourtant si évidente et qui avait fait l’objet, quelques heures après la catastrophe, d’une promesse de la part du président de la République de l’époque, François Mitterrand.

 

Le Collectif de la catastrophe du 5 mai 1992 a vécu bien des tourments depuis cette sinistre date. Il a fallu d’abord aux victimes et à leurs familles se relever péniblement d’un drame épouvantable où, pour assister à un match de football, au nom de leur joie et d’une excitation collective, des milliers de personnes ont été précipitées dans le vide et 18 d’entre elles n’en sont jamais revenues, une 19e étant décédée des suites de ses blessures quelques années plus tard. D’autres auront souffert des mois durant, voire des années, sur leur lit d’hôpital, certaines encore en gardent les séquelles. Il aura fallu aussi vivre les enterrements l’un après l’autre, au cœur de tensions ignobles car, pour ceux qui n’ont pas connu l’histoire, il faut se souvenir que le Collectif n’a pas reçu immédiatement le soutien qu’il était en droit d’attendre de l’ensemble du peuple corse. La perplexité face à un tel drame, puis les hontes et les non-dits entourant les responsabilités de la catastrophe ont supplanté l’indispensable solidarité. Le Collectif gênait car il demandait des comptes. Ceci n’est pas à la gloire de la Corse. Il a fallu supporter les chapes de silence d’une société corse médusée, honteuse, perdue. Il a fallu ensuite traverser toutes les épreuves des procès, accepter les condamnations minimes sur le plan judiciaire, pire, les non-lieux sur certaines responsabilités, concentrant toute la charge de ce désastre collectif sur quelques-uns. Il aura fallu accepter l’extinction de l’action publique, après l’assassinat du président du club de l’époque, et vivre un affrontement fratricide au sein de la famille nationaliste dont le drame de Furiani n’aura pas été non plus totalement absent. Il aura fallu supporter les promesses non tenues des gouvernements successifs, les mensonges, le mépris ignoble, parfois, trop souvent, des instances toutes puissantes du football français, supplantant même les engagements d’État. Il aura fallu attendre que les parents vieillissent sans leurs enfants, que les épouses se reconstruisent sans leur mari, que les enfants grandissent sans leur père pour les voir reprendre le flambeau des revendications de ce Collectif bien éprouvé. Et c’est au prix de toutes ces années de souffrances, qu’enfin, le Collectif a trouvé écho au sein de la société corse, des clubs de football et de sportifs de toute l’Europe, de politiques et de soutiens de toute part. Il aura fallu qu’enfin aussi le nationalisme accède aux plus hautes représentations politiques de l’État, à l’Assemblée Nationale et au Sénat, pour que la revendication de la reconnaissance de cette souffrance, soit enfin entendue. Et quel sujet à la fois plus intime et plus fort en symbole que cette reconnaissance pour marquer la première loi proposée par le nationalisme corse, et adoptée à une écrasante majorité de la représentation nationale !

Nos trois députés, portés par Michel Castellani qui en était le rapporteur, et notre sénateur lors des navettes parlementaires au Sénat, ont su s’entourer de groupes qui pèsent aujourd’hui, et convaincre au-delà de ceux-ci, pour obtenir cette sacralisation*.

 

Le mot « sacralisation » n’est peut-être pas tout à fait adapté, il s’agit désormais de ne plus jouer un match de compétition ou de faire la fête comme cela s’est malheureusement fait depuis le drame, non pour se fermer au football, non pour vivre dans le passé de ce drame, mais au contraire pour lui redonner sa vraie dimension, de respect et de dignité humaine. La reconnaissance du drame, et surtout des mécanismes qui y ont conduit, la lutte contre ces mécanismes, l’instruction des jeunes générations de sportifs, l’hommage rendu à toutes les victimes de cette catastrophe, l’humilité à rappeler sans cesse devant les lois du sport, la tolérance et le respect à prôner dans les compétitions, supplanteront désormais toute autre considération ou dérives sportives chaque 5 mai. Peut-être que ce combat enfin abouti permettra d’améliorer le sport et de combattre les dérives de l’argent qui le pervertissent. En ce sens, ce fut un noble et nécessaire combat. Merci au Collectif des victimes du 5 mai 1992. Merci à nos élus et aux députés et sénateurs qui ont su entendre ce message. #Furianimaipiù. •

Fabiana Giovannini.